Qui sommes-nous en réalité ? Qui êtes-vous ? Êtes-vous vraiment les mêmes que ceux que nous avons rencontrés il y a quinze jours de cela dans cette même salle, dans ce même lieu ? Ou bien n’avez-vous pas changé ? Qu’est ce qui fait notre identité ? Qu’est ce qui nous permet de définir ce que nous sommes individuellement et collectivement ? Bien sûr il semble que la mémoire soit nécessaire à notre identité personnelle, bien sûr il semble que pour nous définir nous ayons besoin de nous souvenir. Et pourtant la mémoire ne nous empêche-t-elle pas d’évoluer, de changer, de nous renouveler ? Ne nous empêche-t-elle pas de devenir petit à petit autre que celui nous étions ? Ne nous prive-t-elle pas de notre liberté ? Faut-il avoir des souvenirs pour savoir qui nous sommes et qui nous devons rester ? Faut-il au contraire se défaire de la mémoire pour s’ouvrir à de nouvelles potentialités ? La mémoire nous dit-elle qui nous sommes ?
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Nous ne sommes pas seuls, et dans la société qui fait notre expérience quotidienne nos libertés se rencontrent, s’entrechoquent souvent, se heurtent parfois frontalement. Nous avons été blessés par les autres, et nous les avons blessés. Nul ne peut dire qu’il n’a jamais fait de tort à personne ; et nul non plus, sans doute, que personne ne lui en a fait. De ces fautes commises, ou subies, nous pouvons effacer le reproche : le pardon est nécessaire pour éviter que la vie en société ne devienne bientôt un enfer. Mais jusqu’où est-il nécessaire ? Jusqu’où même est-il possible ? La souffrance est parfois irréparable ; quand le mal commis par autrui m’a plongé comme en enfer, ne serait-il pas fou de vouloir encore pardonner ? N’y a-t-il pas des fautes qui resteront irrémissibles, ineffaçables, indépassables ? Peut-on vraiment tout pardonner ?