La table crée les conditions de la rencontre ; elle est le lieu d’une expérience sociale. Plutôt que de prendre de la place, elle offre un espace aux hommes, leur permettant tant de vivre des moments de partage que de se confronter les uns aux autres.
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Au nom de quoi donner sa vie ? Question immense et qui pose sans doute de la manière la plus radicale qui soit la grande question éthique, la question morale fondamentale : « au nom de quoi donner sa vie ? » Nous vivons dans une période traversée par une forme d’individualisme. L’individualisme n’est pas nécessairement un égoïsme, l’individualisme est une métaphysique qui regarde le monde comme étant composé d’individus dont chacun poursuit ses propres calculs. Dans cette perspective là, il peut être tout à fait adéquat de donner quelque chose si on espère un retour, de donner quelque chose comme une forme d’investissement, de donner de son temps pour un travail rémunéré, de donner de son argent pour pouvoir espérer se lier d’amitié avec quelqu’un ou bien se faire des obligés. Donner peut être très rationnel du point de vue du simple calcul. Donner n’importe quoi peut permettre d’espérer un retour quel qu’il soit. Mais donner sa vie, c’est à dire donner d’une certaine manière tout ce que l’on a, tout ce que l’on est, c’est bien le choix le plus radical qu’on puisse imaginer. Au nom de quoi pourrait-on bien imaginer donner sa vie, sans que cet acte de donner sa vie ne soit assimilable à une sorte de folie ? Au nom de quoi donner sa vie ?
Noël approche ! Et avec cette fête, la tradition qui l’accompagne, celle de se faire des cadeaux. Peut-être les vôtres sont-ils déjà faits… Mais derrière l’évidence familière de ce rituel se cache en fait quelque chose de très mystérieux. Quelle étrange motivation peut bien conduite un individu rationnel à dépenser pour ce qui semble ne rien lui rapporter du tout ? Bien sûr, le marché profite de tout, et déjà les grands magasins se sont couverts de vitrines qui vous incitent à dépenser. Pourtant cette dépense ressemble bien à une aberration économique. Peut-être ne l’est-elle pas tant qu’elle n’en a l’air ? Quels retours peut bien espérer celui qui donne gratuitement ? Et d’ailleurs, est-ce si gratuit que cela ? Que gagne-t-on à donner ?
L’amour semble par essence gratuit, désintéressé : mais ce qui en fait la beauté risque du coup de le rendre illusoire. Car quel homme ne cherche pas son propre intérêt, son propre bonheur ? A l’époque où l’amour semble devenir un marché comme les autres, il est difficile d’imaginer que l’individu soit capable un jour de s’élever au-dessus de lui-même, pour ne plus se préoccuper que de l’autre. Si nous cherchons à savoir ce qui nous entraîne à aimer, ne risquons-nous pas de retomber sur notre propre égoïsme, dissimulé derrière une générosité fragile ? Lire la suite